Parler de son corps, je ne l'ai jamais fait. J'ai toujours été d'une pudeur intense. Mon corps n'appartenait qu'à moi et personne ne devait le voir, le juger, le commenter. Alors ce corps, je l'ai regardé grandir, s'arrondir, se former puis se déformer.
Enfant, j'étais fluette, deux jambes ficelle et un petit corps tout en côtes ; puis lentement mais sûrement et sans vraiment savoir pourquoi ma carcasse s'est arrondie tout en grandissant. Puis d'arrondie, je suis devenue obèse puis à l'age adulte obèse morbide. J'adore cette appellation médicale "obèse morbide" qui signifie que mon excédent de poids me met en danger...
Bref cette carcasse, que j'avais apprivoisée, avec laquelle je poursuivais mon chemin et que j'avais appris à aimer, m'a trahie. Trahie, c'est ce sentiment là que j'ai ressenti au plus profond de moi lorsque j'ai su que j'étais cancéreuse...Alors quoi ! toutes ses années d'adaptation, tous ces kilos trimbalés, assumés, acceptés, n'ont servi à rien !!! Parce que quoi ! Il faut bien l'admettre, toute cette graisse accumulée et entretenue devait servir à me protéger ! Et puis rien. Le vide.
Ensuite il a fallu accepter la mutilation, enlever mes deux seins pour les remplacer par deux bouts de silicone vaguement flottants ! On dit adieu à cette partie de son corps en prenant la dernière douche à la bétadine, on les caresse, on les colore de cette couleur orangée qui empeste et l'on sait qu'au réveil , ils ne seront plus là. Etrange sentiment d'abandon...Bien sûr, il y va de ma vie alors on accepte une fois de plus et on apprend à regarder ces deux nouvelles "masses" insensibles ou presque, puis on les touche et enfin on les masse (puisque c'est essentiel pour éviter les complications!!). C'est un autre parcours que l'on ne réalise pas seule mais presque ; des décisions que l'on assume toute seule et un autre départ avec un autre corps, une autre carcasse. Presque une renaissance ?
mercredi 10 juin 2009
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